Je ne suis pas une grande lectrice de BD (vous l'avez sans doute remarqué) mais j'aime bien la BD reportage. En général, ce sont de très gros volumes, c'est peut-être ce qui me plait, ou alors cette manière d'aborder différemment le documentaire, à la fois accessible et riche de contenu.
De temps en temps, une BD croise ainsi ma route, ou l'inverse, et ça a été le cas des Ignorants d'Etienne Davodeau.
Oh, j'en avais entendu parler, à sa sortie, et j'avais beaucoup aimé le sujet : un auteur de BD et un vigneron qui travaillent ensemble, l'un découvrant la vigne et l'autre la bande-dessinée. Je m'étais même dit que ce serait le cadeau idéal pour mon mari - et puis, je ne l'avais pas noté, le temps a passé et je n'y ai plus pensé (honte à moi, d'ailleurs, pour le cadeau).
L'occasion s'est présentée quand un exemplaire est arrivé à la bibliothèque. En plus, j'ai eu de bons échos. Je l'ai donc tout de suite pris pour mon mari (quand même, il fallait bien que je me rattrape, même si lui n'en savait rien !) et puis, bien sûr, puisqu'elle était là, je l'ai lue. ;)
J'ai beaucoup aimé. D'abord, le dessin : je ne sais pas comment fait Etienne Davodeau pour retranscrire comme ça, juste avec du noir et blanc, la douceur d'un pique-nique sous l'ombrage des arbres...
On est plongé dans cette campagne, ces vignes, qu'on arpente à travers les saisons aux côtés de Richard. Un sacré personnage, Richard, et sa découverte de la BD est souvent assez savoureuse.
Mon moment préféré, je crois, c'est Richard à l'expo Moebius ("un des plus grands auteurs français contemporains" l'a averti Etienne).
Rassurez-moi, vous aussi, ça vous fait ça, des fois ?
Ce n'est qu'une anecdote, ceci-dit, parce que Richard va aussi découvrir de vrais coups de cœur, échanger avec des auteurs, rencontrer les éditeurs... tout en étant voué à devenir un personnage de BD, finalement. Et les échanges entre auteurs, on y assiste avec lui en ayant l'impression de découvrir un peu des coulisses.
Mais ce qui ressort surtout, c'est le travail de la vigne, le souci du sol, de la terre, la rencontre avec d'autres vignerons d'une génération qui essaie d'inventer des manières plus authentiques de faire du vin.
Un apprentissage pas toujours simple et qu'Etienne Davodeau rend tellement vivant.
Avec lui, on apprend une foule de choses, et on mesure à quel point le travail agricole (une expression que j'emploie faute de mieux) requiert de savoirs, scientifiques, empiriques, et évolue au fil des expérimentations et aussi de choix, d'orientations - la recherche de vins moins calibrés, qui "lui parlent" plus. C'est ainsi que souvent, le travail du vin rejoint celui de la BD, et qu'artisan et artiste ne sont pas si loin l'un de l'autre.
Bon, tout à l'heure, je le rends à la bibliothèque et je le mets bien en évidence, celui-ci, qu'il continue son tour chez d'autres lecteurs. D'ailleurs, j'ai une petite pensée pour celui qui a dû le lire avant moi en plein petit déjeuner, en laissant quelques miettes entre les pages - mince, je suis pas la seule à lire avec mon petit déj à côté ?